Marché de l’immobilier : comment s’en sort Vichy

Avec la crise du logement, difficile de se projeter pour acquérir un bien, ou plus simplement pour se loger à Vichy. Heureusement, L’Effervescent a enquêté pour vous, afin de mieux comprendre l’économie immobilière de la ville. 

On entend souvent dans les médias parler de la « crise du logement ». L’expression traduit le besoin des personnes d’avoir accès à un logement à des prix justes et le mur auquel celles-ci sont, bien trop souvent, confrontées. La hausse des prix rend, pour beaucoup, l’accès à la propriété impossible et le manque de logements sociaux ne permet pas la satisfaction des besoins d’une nombre grandissant de précaires. Selon l’OCDE, entre 1996 et 2021, les prix immobiliers ont augmenté 2,3 fois plus vite que les prix à la consommation, et 1,7 fois plus que le revenu des ménages.

Au sud du département de l’Allier, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, la ville moyenne de   Vichy (27 000 habitants, 67 000 pour l’agglomération), bénéficie, avec son cadre de vie agréable et son intégration dans le large bassin d’emploi de Clermont-Ferrand, de bons atouts pour échapper à la crise du logement. Pourtant, la « reine des villes d’eaux » ne tire que partiellement son épingle du jeu sur le plan immobilier.

• Le foncier à Vichy, une question de perspective

3 821 €, c’est le prix médian du mètre carré en France en 2024. De prime abord, Vichy semble donc un bon choix pour y investir vos économies, avec son tarif moyen de 2 730 € par m². Pourtant, les choses se compliquent rapidement.

Premièrement, Vichy et son aire urbaine sont de loin les villes où le foncier est le plus cher dans le département de l’Allier, ce qui limite son attractivité.

Deuxièmement, avec sa faible superficie de 5,85 km², difficile de trouver un terrain vierge sur lequel investir à Vichy. Comme l’explique Claire Vialfont, directrice du projet de ville à la mairie, « Vichy est une ville qui s’est urbanisée très tôt ».  Elle qui essaye d’intervenir pour dynamiser la ville et créer des centres attractifs, doit composer avec une ville saturée.

Si bâtir de plain-pied nécessite souvent la destruction d’un bâtiment déjà présent à Vichy, il faut encore bien choisir son emplacement. En effet, bien qu’elle soit petite, Vichy est assez hétérogène en matière de prix. Pourtant, Henri Sarre, agent immobilier chez ImmoVichy se veut rassurant, « il y a une hétérogénéité comme elle peut exister dans toutes les villes, mais il y a quand même des biens qui peuvent être chers dans des quartiers un peu moins cotés et inversement ».

• Une offre peu diversifiée

Bien que la qualité des biens prime sur leur emplacement, l’agent immobilier doit l’avouer, Vichy souffre d’un manque de diversité des offres. Quand on lui demande quel est le profil typique des propriétés foncières, deux choses lui viennent en tête. Les appartements situés en centre-ville, majoritaires à Vichy, assez petits, sont recherchés par des couples sans enfants, ou par des personnes âgées. Situés en cœur de ville, ils bénéficient de leur proximité avec les commerces et les écoles. « Souvent, ces appartements sont la cible des personnes qui recherchent un cadre de vie. Ils veulent prendre le temps, avoir accès à tout, en quelques minutes de marche », précise Henri Sarre.

À l’inverse, les appartements familiaux, plus grands, se situent davantage dans les quartiers périphériques (quartier de France, quartier République, Jeanne-D’arc…). Plus isolés des commerces et plus loin du centre-ville, ces logements sont bien souvent moins chers. Claire Vialfont est bien consciente de ce problème, et admet travailler dessus : « On fait un travail en dentelle dans ces quartiers-là, pour créer des petits centres attractifs […] Le but est d’attirer des commerces et des offres culturelles pour que toutes les personnes qui vivent dans ces quartiers-là ne soient pas isolées ». Cette volonté de la mairie de pallier l’absence de commerces de proximité s’est traduite par la mise en place du programme AGIR 2035.

Les maisons, elles, ne sont pas nombreuses à Vichy. Elles sont plutôt situées sur les communes limitrophes, comme Bellerive et Cusset. Les familles qui les recherchent sont souvent contraintes d’utiliser la voiture pour tous leurs déplacements.

Si les appartements constituent la principale offre des agents immobiliers de Vichy, ce n’est pas seulement parce qu’ils sont recherchés. En effet, presque deux fois plus chers que les maisons, les appartements ont parfois du mal à trouver preneur chez les personnes actives. Avec un prix médian du m² qui avoisine les 3 300 €, pour 1 932 € le m² des maisons, le « choix » est vite fait pour les plus petits budgets.

• Une crise bien visible

Il est courant dans chaque commune que le centre-ville coûte plus cher que la périphérie. Ce qui est moins courant, c’est la rareté des logements à l’extérieur des villes. En effet, trouver une maison à Vichy n’est pas une mince affaire. En novembre 2024 à Vichy, 300 appartements ont été vendus. À la même période, seulement 70 maisons l’ont été aussi.  Face à cette crise, les plus précaires doivent se contenter du statut de locataire. Selon l’ADIL03, en 2014, 47,5 % des résidences principales de Vichy étaient habitées par des locataires, un chiffre hors norme à l’échelle nationale puisque les locataires ne représentent « que » 24.7 % des ménages sur le reste du territoire.

Cette différence pourrait bien s’expliquer par la proportion, elle aussi hors norme de personnes de plus de 65 ans, avec de plus forts revenus, propriétaires de biens immobiliers à Vichy, qu’elles proposent à la location.

Pour pallier ce problème d’accession au logement, les logements sociaux sont pour beaucoup une solution. Seulement, les obligations de Vichy en la matière ne sont actuellement pas respectées. Un problème qui « devrait être réglé » dans les années à venir grâce au programme AGIR 2035, estime Claire Vialfont. « Notre travail aujourd’hui, c’est d’intégrer des logements sociaux dans chaque projet de ville », assure la déléguée.

• L’avenir de l’immobilier à Vichy

 Si les statistiques de rentabilité de l’investissement immobilier à Vichy affichées par certains sites spécialisés semblent encourager le placement financier, les agents de terrains comme Henri Sarre semblent être plus pragmatiques. Bien conscient de la crise économique actuelle, et de celle du logement, lui s’attend davantage à une prochaine baisse des prix : « Rien de drastique, mais une dizaine de points me paraîtrait logique. Après la hausse des prix très forte qui a suivi la crise COVID, puis l‘inscription [en 2021], de la ville à [la liste du patrimoine mondial de] l’UNESCO, le marché devrait davantage se normaliser ». En effet, si par sa taille, Vichy avait pu relativement bien résister à la hausse des prix par le passé, ce phénomène évoqué paraît crédible pour les experts.

Guillaume Kempa